Né un 21 avril, Neku est un fier natif de Shibuya, un monde d’apparence moderne, semblable à la Terre et qui ne possède pratiquement aucun contact avec les autres mondes. Une douce ignorance, loin des guerres, loin du conflit de l’ombre et de la lumière. Une existence banale, deux parents travaillants sans doute un peu de trop pour leur assurer une vie confortable, le lever, le petit-déjeuner, traverser la ville pour se rendre à l’école, rentrer, les loisirs …

Puis, le lendemain, tout recommence, encore et encore. Grandir, s’épanouir et les amis aussi. Enfin, un ami, son meilleur ami. Rencontré durant l’enfance, il fut son roc durant ses jeunes années, celui vers qui se tourner, celui qui partage le chemin du retour, celui qui est invité aux anniversaires, celui vers qui se tourner pour les travaux de groupe. Neku, déjà plutôt introverti, n’avait pas besoin d’une autre amitié que la sienne pour égayer ses journées. Après tout, lui comprenait quand il avait besoin de se couper du monde, lui l’écoutait sans arrêter quand il s’extasiait sur la dernière œuvre de CAT, lui l’accompagnait dans cette partie de la ville que les adultes leur avaient pourtant interdite à mainte et mainte reprise. « Coin dangereux ? Ruelles étroites où on ne sait qui y traine ? Avec une circulation qui ne fait attention ? », du haut de ses 14ans, rien n’avait plus de séduisant pour Neku que de trainer après les cours dans les ruelles d’Udagawa, d’y contempler des heures durant la plus célèbre œuvre de CAT et d’y entrainer son meilleur ami réticent par la même occasion. Avec sa tête bien faite, Neku n’avait pas besoin de beaucoup de temps pour ses leçons. Avec ses parents un peu trop absents, Neku avait ce qui lui semblait une éternité pour admirer, toucher, ressentir la fresque. Avec sa manière de le supplier, Neku n’avait aucun de mal à convaincre son ami de se donner rendez-vous dans ce soi-disant coin dangereux. Un coup de coude dans les côtes, une promesse de lui payer un de ces extravagants café en rentrant et le tour était joué.

Pourtant, un après midi comme un autre, son ami ne l’a pas rejoint. Le lendemain non plus, ni le reste du weekend. D’ailleurs, il n’est même pas venu à l’école ce lundi-là, et n’a pas répondu aux messages passant du désagréable, à l’énervement, puis à l’inquiétude.
A Shibuya, les tragédies de ce genre ne sont pas exactement impensables, la ville possède un certain trafic après tout…mais un accident mortel et impliquant un adolescent, le choc fut réel. Ces jours dissolus qui s’enchainent, automatiquement. Les hommages, les condoléances, les funérailles, les pleurs. Puis, l’abrupte retour à la normale, et pour Neku, l’abrupte réalisation de cette solitude nouvelle, et sa culpabilité. Qui d’autre que lui l’incitait sans cesse à se rendre dans ce quartier ? S’il n’avait pas de nouveau insisté pour qu’il le rejoigne, ne serait-il pas encore en vie ? La réponse lui semblait évidente. A partir de cet instant, l’adolescent n’a eu de cesse de s’isoler. Il se replia pour gérer son deuil qui finit par se changer en colère, contre lui et contre tout Shibuya. Une misanthropie qui ne passa pas inaperçu pour l’ange en charge du monde.

A 15ans, Neku n’avait pas changé ses habitudes. Une routine devenue grise et sans saveur, égayée par ces si longs moments à observer, scruter, étudier l’œuvre de CAT à Udagawa. Ce jour là n’avait rien de particulier et l’adolescent s’apprêtait à rentrer quand un vacarme soudain attira son attention. En un éclair, un adolescent plutôt bien habillé et.. armé (?!) fit irruption dans la ruelle. A sa suite, un jeune homme tout en noir le poursuivait, lui aussi visiblement armé. Pris de court, Neku ne put qu’assister, paralysé, à cette étrange scène sortie d’un film d’action à bas budget. Les deux nouveaux venus s’échangèrent des coups de feu, et Neku se laissa tomber au sol de peur. A peine quelques interminables minutes plus tard, l’homme plus âgé pris la fuite. L’endroit redevint calme. Puis, un dernier vacarme, une douleur aigue dans le dos et le froid du bitume qui s’écrase sur sa face. Un sourire entendu au visage, l’adolescent bien habillé contempla son œuvre et, avant d’éclipser, déposa un badge noir à tête de mort sur le corps de sa victime.

C’est ainsi que se termina la vie de Neku Sakuraba, tué d’un coup de feu en plein jour dans une ruelle de sa ville natale. Pourtant, cette nouvelle ne fit pas le tour du monde. Elle ne fit pas la une des journaux. Elle ne choqua pas les habitants, pas plus que ses propres parents. Personne ne le pleura. Personne ne se souvint de lui. En mourant ce jour là de la main du Composer ce la ville, Neku fut simplement effacé de la mémoire collective et transporté ailleurs.

Le lendemain, il se réveilla au beau milieu du Scramble Crossing, le croisement le plus important et le plus célèbre de son monde. Loin, de la ruelle sordide où il a rendu son dernier souffle donc. Il se réveilla, un peu désorienté, se demandant comment il avait bien pu se retrouver là, se demandant pourquoi les passants l’ignoraient plus que d’habitude… jusqu’à ce que l’un d’entre eux lui passa littéralement à travers. Désagréable inexplicable glaciale sensation. Neku n’eut pas le temps d’analyser sa situation que l’impossible se présenta face à lui : une horde de monstres-grenouilles apparut de nulle part, sans alerter personne d’autre que lui, le prit en chasse. Il s’enfuit, impuissant, passant et transperçant les autres habitants qui restaient sourds et aveugles à ses appels à l’aide. Il se réfugia près de la statue du chien Hachiko et cru voir sa dernière heure arriver quand une personne répondit à son appel : Une adolescente habillée à la mode, crop top, short, bottes hautes, de longs cheveux rouges… typiquement le genre qu’il aurait snobé sans même y penser. Elle était accompagnée d’un chat noir en peluche…autonome ? L’étrange duo urgea Neku de nouer un pacte avec elle, qu’il s’agissait de l’unique manière pour eux de se débarrasser de ces monstres étranges. Réticent, il accepta et tous les deux (trois ?), ils se débarrassèrent des créatures.

C’est ainsi que Neku rencontra celle qui est devenue sa première partenaire, et finalement la première vraie amie depuis une éternité. En si peu de temps, elle dut le mettre au parfum de la galère dans laquelle ils étaient tous les deux. Ces monstres ? Des noises, qui prenne forme à partir des pensées négatives dans gens pour attaquer sans arrêter les joueurs qui n’ont pas noué de pacte. Les joueurs les éliminent à l’aide de badges, qui débloquent leur pouvoir psychique… comme ces flammes donc. Jeu ? Joueurs ? Le jeu des faucheurs, organisé par les faucheurs et leur maitre de jeu de la semaine. Une semaine de missions à temps limité où l’échec n’a pas lieu d’être, au risque de subir l’effacement. L’objectif ? Survivre une semaine, seuls les vainqueurs pourront se voir octroyer un souhait, celui de revenir à la vie, dans le RealGround, et de voir le moment de sa mort être effacé.

…Le realground ? Le monde réel, l’opposé de l’underground où évolue les joueurs, les habitants de Shibuya qui ne voient, ni entendent, ni ressentent la présence des noises ou des joueurs. Ces derniers sont au mieux des fantômes pour eux.

Peu de temps, beaucoup d’informations à assimiler qui ne vont écho à rien du tout car mis à part son nom, l’adolescent ne se souvient de rien le concernant. Perturbant, déstabilisant. Mais qui n’a pas empêché Neku et sa partenaire de remporter le jeu après 7 jours d’enfer. Au départ, l’adolescent était plus que réticent, cassant, coupant, traitant sa partenaire comme un poids nécessaire à sa survie. Neku trainait les pieds dans ces détours dans les boutiques qu’elle lui imposait, dans ces rencontres avec les autres joueurs qui ne l’intéressait pas…et ces prises de tête avec elle sur sa peluche ridicule, sa manie maniaque de s’extasier devant les vêtements affichés en vitrine. Et pourtant, petit à petit, jour après jour, il finit par s’ouvrir à l’idée. Il finit par accepter son amitié franche et à la considérer comme sa partenaire. Comme une amie ?
Certainement. A la fin de cette semaine de jeu, ils formulèrent une promesse, celle de se retrouver dans le Realground, en face de la statue de Hachiko. Mais les retrouvailles devraient attendre car seule Shiki a soi-disant accumulé suffisamment de point pour revenir à la vie… En théorie. En pratique, quoi de mieux pour le « motiver » dans cette nouvelle partie que de kidnapper Shiki et de mettre sa vie dans la balance, en tant que frais d’inscription, évidemment. Ses souvenirs pour la première semaine, sa seule amie pour la seconde.

Pour Neku, c’est retour à la case départ, retour dans le jeu pour une nouvelle semaine, sans la seule personne qui a pu ébrécher sa carapace d’emmerdeur mais avec assez d’expérience pour triompher. Un joueur qui revient pour une deuxième partie, c’est encore du jamais vu. Les faucheurs sont intrigués, quelque chose de différent vient changer leur routine ennuyante. Plus déterminé que jamais, Neku entame sa seconde session, accompagné d’un nouveau partenaire qu’il n’arrive pas à cerner : Yoshiya « Joshua » Kiryu, un adolescent visiblement de son âge, habillé classiquement, qui a le don de le faire sortir de ses gonds en à peine deux phrases et.. en vie ? Est-ce seulement possible pour participer au jeu ? Il est frustrant, Joshua. Il ne dit jamais vraiment le fond de sa pensée, échafaude des plans sans consulter son partenaire, et s’attend à ce qu’on le suive sans répondre à la moindre question. Neku a du mal à lui faire confiance, le soupçonne même d’être directement ou indirectement responsable de sa mort, sans preuve. Joshua ne dément pas, pas plus qu’il ne le confirme… A moins que ce ne soit quelqu’un d’autre ? Neku ne sait sur quel pied danser, mais s’efforce à travailler avec lui et à collaborer dans son plan louche, en plus d’esquiver le maitre de jeu de la semaine, Sho Minamimoto. Ce dernier est plus qu’étrange, n’impose pas de missions, et passe son temps à hurler dans son mégaphone pour les insulter de.. zeptogrammes ? En plus d’en savoir bien plus sur eux qu’il ne le dise.. et si c’était lui le responsable ? Le plan de Joshua les emmène à enquêter sur un nouveau type de noises : les taboo noises. Monstres de l’UG inconnus, surpuissants, impossibles, et surtout responsables de la mort de nombreux joueurs cette semaine-là. Une chose est sure, ils semblent être liés à Sho. Le dernier jour de la semaine voit leur affrontement final. Le maitre de Jeu ne joue pas dans les règles. Il est rapide, chaque coup ne semble pas l’affecter, et pourtant, ils triomphent, non sans mal, non sans une dernière attaque dévastatrice de leur adversaire.

Ils ne s’en sortiront pas, victoire de courte durée. Ils ne s’en sortiront pas tous les deux en vie, c’est le raisonnement apparent de Joshua lorsqu’il pousse son partenaire du building, empêchant l’explosion de l’atteindre. A ses dépens.

Une nouvelle fois, Neku remporte le jeu des faucheurs avec un gout amère en bouche. Une nouvelle fois, il est transporté devant le Conductor, l’homme qui chapeaute les maitres de jeu. L’homme qui lui a enlevé Shiki une semaine plus tôt. L’homme qui, une fois encore, ne lui accorde pas la victoire. Pourtant, il est le vainqueur, et l’unique cette fois-ci, mais Kitaniji déclare la semaine comme nulle, citant le pacte entre Neku et Joshua comme illégal. Les vivants et les morts ne peuvent pas participer ensemble. Pour sauver Shiki, il ne lui reste plus qu’à participer une troisième fois à la mascarade. La rage monte, en deux semaine, Neku a perdu les deux seules personnes à qui il fait confiance, arrachés à cause d’un jeu stupide qu’il subit sans trop savoir comment il y est entré. Un purgatoire sans punchline. Quel autre choix a-t-il que d’accepter cette révoltante proposition. Alors, il serre les dents, et replonge. Il se réveille pour la troisième fois au milieu d’une foule qui ne le voit pas, mais qu’il peut entendre penser. Chaque jour de mieux en mieux, de plus en plus fort. La troisième semaine commence, et il se rend compte qu’il est désormais le seul et l’unique joueur, voué à échouer puisque sans partenaire avec lequel se défendre des noises de plus en plus brutaux.

Le plan secret de Kitanaji pour s’assurer de se débarrasser de lui, presque parfait. C’est Beat, un joueur de la première semaine devenu faucheur qui lui sauve la mise. Il devient le troisième partenaire de Neku et renonce de ce fait à son statut. Beat est un gars entier, qui n’a que faire des obstacles sur sa route. Il a un et un seul objectif en tête : il va sauver Rhyme… mais compromet sans hésitation son plan quand une injustice -celle de Neku en l’occurrence- se présente face à lui. Il est difficile de ne pas lui faire confiance, tellement ses pensées et ses &motions se lisent sur son visage. Le nouveau duo a une unique mission : localiser et battre le maitre du jeu de la semaine. Celle-ci reste introuvable durant six longs jours, un jeu de cache-cache qu’elle maitrise à la perfection et pour lequel, elle n’hésite pas à tricher. Malgré tous ses stratagèmes, elle finit par être défaite. Mais la partie n’est pas finie. Le jeu ne pourra se finir véritablement que lorsque le chef d’orchestre de cette histoire sera mis hors d’état de nuire, lui et son étrange chef que personne ne connait : le Composer. Neku en a conscience, et ils s’enfoncent dans son repaire, prêt à le défaire.

Kitanaji est un adversaire formidable, malin, peu fair-play, mais surtout prêt à tout pour triompher. Il s’empare des trois partenaires de Neku -Joshua est en vie ?- pour le défaire. Il cite la défense de Shibuya, qu’il est prêt à tout pour maintenir ce monde… Ne souhaite-t-il pas pourtant l’endommager en organisant ce long jeu ? Un par un, l’adolescent libèrent ses amis, et ensemble, ils infligent le dernier coup de la victoire. Ils vont enfin être libéré du jeu, libérer leur monde de ce jeu sordide qui ne peut pas être bénéfique pour ses habitants. Retourner dans le monde réel, ensemble, se retrouver, retrouver le quotidien si banal soit-il.

Une dernière fois, la victoire se teint d’amertume pour Neku. Sa victoire n’a fait que condamner Shibuya à une destruction certaine. Kitanaji n’a jamais été le seul derrière l’organisation du Jeu des faucheurs. Qu’est-ce qu’un chef d’orchestre sans le compositeur de sa musique ? Joshua baisse enfin le masque, révélant qu’il est le Composer, le véritable meneur, le véritable ennemi. Il raconte, pour la première fois sincère, qu’il s’est lassé d’être le protecteur attitré de ce monde qui l’ennuie profondément. Il raconte qu’il a lancé un pari avec son bras droit, le destin du monde en jeu. Il raconte qu’il a choisi parmi les habitants, quelqu’un pour le représenter, sa procuration, son proxy. Un gamin qui hait autant que lui Shibuya, qui déteste les autres autant que lui.
Il a choisi Neku Sakuraba, et Neku Sakuraba a triomphé du jeu non pas une fois, mais trois fois.

Le destin du monde est scellé, soit Neku achève Joshua, son partenaire si énervant et prend sa place, soit le Composer détruira sa ville et ses habitants. Il refuse de tuer son meurtrier. Ne lui fait-il pas confiance, après tout ? N’a-t-il pas brisé sa confiance ? Il baisse son arme, persuadé de condamner le monde. Un dernier coup de feu et il ferme les yeux.

Pour mieux les rouvrir un instant après, de nouveau perdu au milieu de la foule du Scramble Crossing mais cette fois-ci, elle le voit, s’écarte. Il est vivant, le monde aussi. Joshua est revenu sur sa décision. Tous les quatre, avec Shiki, Beat et Rhyme, ils sont revenus de ce purgatoire. Retour dans le quotidien, comme si rien ne s’était passé. Ils se retrouvent, après l’école, les weekends, trainent ensemble comme de simples adolescents.

Presque rien passé.

En arrière-plan de ses aventures, Shibuya s’est mis à stagner, ses habitants, à s’éteindre, son énergie, à s’arrêter. Quelque chose l’attaque, quelque chose de plus que la mort programmée souhaitée par son Composer. Le long jeu l’a affaibli, le cœur de ce monde surpeuplé. Depuis le Realground, le changement est minime dans un premier temps. C’est l’Underground qui doit se défendre de l’attaque des ténèbres. Depuis le long jeu, les effectifs ont été plus que restreint et les jours passant, le Realground s’assombrit de plus en plus, comme une nuit sans fin. Un voile recouvre le monde et ses habitants n’y prêtent pas attention, excepté les anciens joueurs qui n’ont plus accès à la moindre explication.
Quelques semaines après sa dernière partie, Neku reçoit la visite d’une faucheuse, Coco, adolescente lolita, qui lui explique, l’invite à prendre part au combat pour sauvegarder Shibuya contre la nouvelle menace dans l’Underground. Il demande pourquoi Joshua n’est pas celui à lui tendre cette main, s’il est au courant, qu’elle est cette menace. Elle ne lui répond pas entièrement, et pourtant, l’idée de revoir son partenaire, en plus de résoudre le problème dont il est indirectement responsable, l’incite à lui faire confiance.
Ce qui aurait dû être un aller-retour rapide, s’est transformé pour l’adolescent en un départ définitif. A croire qu’il est abonné aux coups de feu dans le dos.
Qu’il est abonné aux réveils difficiles, au milieu d’une rue qu’il ne connait pas.
Qu’il est abonné à l’amnésie, et à cette sensation profonde de devoir retrouver sa partenaire, dans ce jeu dans lequel il ne se souvient pas être entré. Alors que Shibuya est en crise, Neku, et les autres joueurs ont été plongé dans un étrange sommeil, envoyés dans la ville de Traverse endormie. Certainement, Joshua n’est pas étranger à la tournure des évènements, d’une manière ou d’une autre.

Perdu dans ce nouvel environnement, Neku ne sait ni comment, ni pourquoi, ni même où il est. Il est simplement certain de devoir accomplir une mission, de devoir retrouver sa partenaire et, pour cela, de devoir se battre contre les cauchemars avec l’aide de son DreamEater. Il n’a pas beaucoup de temps, cette marque sur sa paume lui prouve et prouve qu’il est un joueur. Comment a-t-il obtenu ce pouvoir ? Comment va-t-il rentrer à Shibuya ? Que sont ces créatures ? Ce genre de question ne semble pas l’effleurer. Il avance, comme prisonnier d’un rêve qui ne s’arrête pas à la fin de la journée. Le temps est absent, flou, dissolu. Dans la ville de traverse, il cherche, cherche et cherche encore Shiki. Son seul objectif, pour lequel tous les moyens sont bons. Il rencontre à la place de la fontaine, un homme habillé entièrement par un manteau noir. Son visage est couvert, il ne peut pas déceler ses traits. Il est méfiant, mais cet homme lui fait une proposition simple et qu’il ne peut refuser. Si Neku lui amène un certain Sora dans le troisième quartier, alors l’homme en noir le mènera à sa partenaire.

Juste ça ? Jouer au guide pour ce Sora, et après il pourra accomplir sa mission ? Est-ce qu’il s’agit d’un autre joueur ? Facile, si on omet les cauchemars à chaque coin de rues. Il accepte la demande de l’homme en noir. Est-ce que cela fait partie de sa mission ? Cela lui semble… familier. Neku finit par localiser sa cible sur la place de la ville. Un jeune homme habillé avec une combinaison rouge et noire, et des chaussures jaunes. Quelque part, l’adolescent imagine Shiki s’évanouir devant ce style improbable. Il l’aborde, et lui explique la menace des cauchemars… comment ne peut-il pas être au courant ? Sora lui semble… bavard, un peu énervant, trop radieux, et pourtant familier. Il se demande ce que l’homme en noir lui veut mais peu l’importe. Il a une mission à accomplir, et n’a plus beaucoup de temps. Il le guide vers le lieu de rendez-vous. En chemin, ils doivent se défaire de plusieurs groupes de cauchemars. Combattre avec Sora lui semble facile, presque évident. Est-ce qu’il s’est déjà battu avec un partenaire à ses côtés ?

Arrivé au troisième quartier, l’homme en noir les accueille, ou plutôt, s’en prend immédiatement à eux. Ce n’était pas le deal ! Sans même y penser, il défend son nouveau partenaire… qui disparait. Neku repousse son adversaire et se réfugie dans un autre quartier. Il reprend ses recherches, incluant Sora dedans maintenant. Il ne peut pas avoir complètement disparu, après tout. Il s’excusera quand il l’aura retrouvé.
Après un certain temps, c’est même grâce à l’aide de Sora qu’il parvint à retrouver Shiki, ainsi que Beat, Rhyme et Joshua.
Neku se réveille de cet étrange rêve trop réel à son goût dans son monde assombri. Tout lui revient, le long jeu, son retour dans le RealGround, puis la visite de Coco et …

Et les ténèbres. Il existe d’autres mondes que le leur -il se réveille de l’un d’eux.. ? Des bribes de ces concepts nouveaux lui reviennent soudainement. Les ténèbres s’en prennent à Shibuya et il est de nouveau dans l’Underground pour se battre. Autour de lui, il reconnait les rues de Shinjuku, en proie à ces monstres sombres aux yeux jaunes, puis d’autres avec ce cœur barbelé sur la poitrine. Ce ne sont pas des noises. Comment a-t-il encore atterri dans un endroit pareil ? Il soupire, la réponse lui semble évidente, sa mission également. Il faut croire qu’on ne se débarrasse jamais réellement du Jeu, une fois qu’on est passé dans l’Underground. Il se bat seul cette fois-ci, mais ne se sent plus seul. Difficile de l’être dans ce monde surpeuplé. Les faucheurs semblent avoir déserté les lieux, ainsi que les habitants du quartier… A moins que la réalité ne soit plus lugubre. Dans le ciel noir, des constellations d’étoiles s’élèvent, alors que dans son dos s’élèvent une muraille transparente. Elle monte, monte, et monte encore, tente et piège les cœurs à l’intérieur. A croire que ce monde ne veut perdre aucun de ses habitants. A croire que tout Shinjuku a été mis en quarantaine et lui avec.

Est-il déjà trop tard ? Les yeux jaunes affamés se retournent vers lui.

Est-il le seul à être encore en vie dans cette partie du monde ? Il se saisit de son badge de feu, embrase ses mains.

Il peste entre ses dents : « Si c’est ta manière de me dire de faire le ménage… »

Peut-il seulement faire le ménage ? Ces bêtes noires reviennent, encore et encore. Il peut se défendre, il peut répliquer mais sans cesse, elles reviennent. Au mieux, il endigue le mal, sans l’empêcher de grandir, petit à petit.

Cet aller-retour ‘rapide’ a duré près d’un an, et Neku a maintenant bientôt 17ans. Son aventure avec Shiki, Beat, Joshua et Rhyme lui semble loin, celle avec Sora, n’en parlons pas. Il garde ses souvenirs précieusement, conscient de les avoir déjà perdus auparavant. Coincé dans les ruines enténébrées de Shinjuku, il a développé sa routine pour ne pas sombrer à son tour et se faire dévorer le cœur. Patrouiller dans les rues, affronter des petits nombres de sans cœur, dévaliser les distributeurs automatiques, ne jamais se reposer trop longtemps. Pour tromper sa solitude, il tente d’entrer en communication avec ces cœurs suspendus, avec plus ou moins de succès. Cet entre-deux le pèse. Il ne veut pas que son monde soit perdu, pas même une partie au vu l’isolement.

Cependant, chaque jour qui passe, il perd un peu plus de terrain. Une ruelle, une boutique, un immeuble. C’est une guerre d’attrition qu’il ne peut pas gagner, malgré toute la puissance de ses pouvoirs psychiques. Un jour -ou une nuit, difficile à dire dans ces conditions- comme un autre, il est tombé, l’affrontement de trop. La dernière rue perdue, la dernière vague de trop. Shinjuku est tombée et pourtant, personne dans ce monde ne s’en souviendra, grâce à cette quarantaine. Un dernier tremblement de terre et le noir l’emporte pour ce qu’il pense être la dernière fois.

Dans cette nuit éternelle, la lumière finit par le trouver. Un peu en retard, ou juste au bon moment, elle l’enveloppe, le protège et se lie à son cœur finalement assez pur pour la recevoir. La lumière s’éveille en lui. Une dernière fois, il s’éveille dans la ville où finissent ceux qui ont perdu leur bataille contre les ténèbres : la ville de Traverse. Une ruelle comme une autre, son atmosphère lui est familière, mais il ne pensait pas y remettre les pieds un jour. Comment… ? Il devrait être… ? Une lourdeur dans la main l’appelle, et il a un début de réponse. Cet objet en forme de clef ressemble furieusement à l’arme que Sora a utilisé contre les cauchemars… comment l’a-t-il appelée encore ?

La keyblade.

Elle porte ses couleurs, le mauve et le noir, la marque du Jeu des faucheurs aussi qui a changé irrémédiablement sa vie. Son porte clef est une miniature du chat noir que Shiki a toujours avec elle. Il reconnait sur la garde la tête de mort qui est cousue sur le bonnet de Beat et son casque. C’est plus encombrant que ses badges, mais au moins, il peut la faire disparaitre. Il finit par être ramassé par des habitants de la Traverse, habitués à l’arrive régulier de réfugiés dans leur monde. Le choc le cloue au lit quelque jours, à moins que ce ne soit la fatigue accumulée ces derniers mois.

Un temps, il s’installe à Traverse, conscient que le voyage inter monde est possible mais sans réussir à comprendre comment s’y prendre pour rentrer. Il profite de ce nouveau calme relatif pour prendre conscience de l’arme qui lui a été.. confiée ? Comment elle est arrivée dans ses mains exactement ? Il aurait aimé avoir eu plus de temps avec Sora, quitte à subir son humeur contagieuse. Il constate que la keyblade est redoutable contre les sans cœurs… plus que ses pouvoirs psychiques.

Quelques temps plus tard, il rencontre une jeune femme pratiquement bleue de la tête aux pieds. Aqua se présente-t-elle, et elle a une proposition dont il se méfie d’abord. Un ordre pour ceux qui possèdent une keyblade ? Apprendre à la manier, à combattre les ténèbres… ça lui semble trop beau pour être vrai. Ce ne serait pas la première fois qu’on cherche à le tromper, et son instinct lui dicte de garder cette clef secrète le plus possible. Cependant, la jeune femme la possède aussi, et semble enclin à partager ses informations...Également sur la possibilité de voyager entre les mondes. Rester coincé à Traverse uniquement ne l’aiderait pas à se rendre à Shibuya, argumente-t-elle. Elle n’a pas tort et il comprend aussi que ce conflit dépasse de loin les frontières de son monde. Il accepte sa proposition. Il accepte d’apprendre et de prendre part à cette guerre dans laquelle Sora est impliqué lui aussi.

Sa mission n’a pas changé, elle s’est juste compliquée.